Il ne fait pas si froid dehors |Prio Ezyl|

Date d'inscription : 08/02/2013

« Tic-tic-tic-tic »
Dans la pièce ocre, un rythme élevé de tintement de tous les petits becs qui creusent dans les pelotes, l’air froid et moite de la grotte en hiver, le passage régulier du garde dans son dos. Le petit duc se sentait bien. En vérité le jeune hibou ne se sentait pas vraiment, il n’y pensait même pas, à ce qu’il pouvait ressentir. Mais il était détendu, et piquait vite dans les débris des petits animaux pour essayer d’y retrouver les précieuses choses dorées qui brillaient dès qu’on les découvraient.

La minuscule femelle grise en retira une de plus, profitant des petites vibrations chaudes que lui faisait les paillettes dans le bec et les posa sur sa pile, qui s’élevait maintenant à la moitié de sa taille : Elle avait passé toute la matinée à récolter des paillettes.
C’était la dernière paillette de la pelote. C’était très dur de savoir combien il y avait de paillettes dans une pelote, mais son esprit avait été totalement lessivé du reste, du coup elle avait eu de la place pour apprendre cela. Alors qu’elle allait se diriger vers la salle des pelotes fraîches, elle entendit son nom. 2346 s’arrêta sans se retourner. Dans son dos, l’oiseau qui l’avait interpellée lui dit de le suivre, alors elle se retourna vers lui et marcha lentement à sa suite.

« Aide ceux-là à porter la nourriture aux prisonniers.»
2246 ne comprit pas vraiment, juste le mot nourriture, mais ouvrit le bec et elle reçut quelque-chose de bizarre dedans. Un peu volumineux, vraiment sec qui semblait tomber en petites miettes. Elle suivit ensuite la petite file de six poussins plus vieux qu’elle, ils avaient presque tous leur plumes déjà.
Elle les suivit ensuite, sans rien regarder autour d’elle, sans voir que la grotte changeait un peu, que les parois devenait plus régulières, et plus grises et qu’il y avait presque pas de lumière. De toute façon quelle importance ? Chaque nuit de sommeil sous la lune était la même, chaque jour était identique, et toutes les pierres de la pension étaient semblables.

Arrivée dans la pièce des prisonniers, elle s’approcha d’une cage il fallait poser, elle posa. Une vision lui électrifia soudainement tout le corps, forçant sa tête à se lever et à regarder plus haut que d’habitude, oui regarder vraiment. Ses yeux ambrés avaient reconnu quelque-chose et envoyé un signe à son esprit embrouillé. Mais son esprit comprenait mal et brulait tous ses nerfs, lui raidissant la nuque, le dos, les ailes. Et partout dans ces nerfs, palpitait une véritable douleur déchirée de pression et de frustration, comme une obsession oubliée qui revient en gémissant.
Cette couleur ocre, et ce gris de cendres et d’argent mélés, ces formes de plumes et ces yeux d’ambres si chauds, c’était un petit-duc qu’elle avait en face d’elle. C’était quelqu’un comme elle, elle ? Dis moi numero 2346, qui es tu ?

Date d'inscription : 10/08/2011

Ezylryb connaissait ces murs froids depuis trop longtemps. Depuis plus d'un cycle maintenant, il n'avait comme vision que le gris monotone des falaises de saint aego, si triste, si sombre. Le temps était le pire des abrasifs sur la chose qu'il avait de plus chère actuellement, l'espoir. Comment pouvait-il croire encore en l'hypothèse qu'un raid vienne le délivrer des griffes de ses bourreaux ?

Non, le vieux ryb se savait depuis le début seul dans son épreuve, l'ayant demandé comme unique requète à ses pairs du conseil. Cependant, la situation n'était pas si mauvaise : il avait tenu tête à Aegis, et celui-ci avait finit par lui laisser la vie sauve. Les informations qu'il avait échangé contre sa vie n'avait en rien trahi l'arbre. Elle montrait juste à quel point le capitaine était dans le faux, et que le rêgne sang pur risquait de ne pas durer.

Mais voilà, entre les échanges qu'ils avaient eu, et la réalité du moment, le gouffre était important. Aegis était loin de la chouette à n'avoir qu'une parole après tout, alors à quoi bon imaginer que le marché conclu porterai ses fruits ? C'était peut-être le pire dans cette situation... se savoir totalement dupé sans moyen de rendre justice à ce qu'il trouvait juste.

Ezylryb fit quelques pas, seule action encore en son pouvoir dans sa prison de pierre et d'acier. Un... deux... puis trois, et le voilà qui avait déjà atteint l'autre coin de la cage. Et encore, il pouvait s'estimer heureux car tout paraissait grand de part sa taille insignifiante. La situation aurait pu être bien pire s'il avait été une effraie, ou pire encore, un grand duc. Rhaaa... qu'est ce que les taquineries de Bubo lui manquait, pensa-t-il. Le genre de grand duc bien dans ses plumes, trop bien... au point d'irriter ses congénères par des blagues rarement bienvenue. Finalement, tous les petits défauts du grand arbre, ses habitants parfois grisants, tout cela avait un air de glaumora (1) comparativement à sa situation actuelle.

Perdu dans ses pensées, Ezylryb ne prêtait presque plus attention au passage régulier, presque mécanique des surveillants de la prison. Le bal incessant n'avait rien d'amusant après tout, même pour quelqu'un dont la seule occupation se résumait à revivre ses actes manqués, ainsi que tous les regrets d'une vie pourtant bien remplie. Aussi, il ne remarqua pas instantanément la présence du jeune petit duc, dressé comme un i face à l'entrée de sa cage.

Finissant par remarquer qu'il était l'attraction de ce débouluné, le vieux prisonnier daigna enfin tourner la tête en le saluant d'un hochement de tête. Ezylryb eu subitement un pincement au cœur. Voir un petit de son espèce, délaissé comme cela pour des tâches indignes était une vue trop douloureuse. Mais que pouvait-il faire malheureusement ? Un gardien destitué du pouvoir d'aider les faibles, voilà ce qu'il était. Pourtant, Lyze avait une vague impression, comme si sa prison n'était que physique...

« L'heure du repas ? Merci bien »

Le petit duc s'approcha de son congénère jusqu'à l'avoir juste en face de lui. Elle semblait vive et Lyze était presque certain que le déboulunage cachait un être digne des meilleurs avenirs. La malchance avait frappé cet être si fragile et il était certain qu'il arriverait à faire évoluer la situation du fond de sa cellule. En l'aidant elle, peut-être arriverait-il à se donner un but, une utilité, un sens...

« Tu as faim peut-être ? » »dit-il en repoussant le repas vers la jeune femelle « tiens, tu sembles en avoir plus besoin que moi »[/b]

(1) = Glaumora est pour rappel le paradis des chouettes